L'ouvrage de Froideterre

 

L'ouvrage de Froideterre a été construit entre 1887-1888. Bien qu’au départ, il devait être un simple poste d’infanterie, il fut complètement réorganisé de 1902 à 1904. De nouveaux abris et une caserne pour 142 hommes couchés ont été construits ; deux postes d’observation cuirassés ainsi qu’une casemate de Bourge à gauche ont été ajoutée ; une tourelle rotative de 75 équipée de 2 canons courts et que 2 tourelles de 2 mitrailleuses sont venues compléter l’armement ; un fossé de 10 m de largeur sur 5 m de profondeur a été creusé tout autour de l’ouvrage ainsi qu’un réservoir à eau.

L’ouvrage est de forme assez inhabituelle. Il se divise en 4 parties séparées les unes des autres. La caserne principale se trouve en diagonale et forme la partie la plus à l’est. Elle est formée en son centre de 3 grandes pièces principales et d’une série de petits locaux de part et d’autre. C’est par l’un des locaux de gauche que l’on accède à l’observatoire et à la tourelle de mitrailleuses. La caserne principale ne dispose d’aucune autre défense.
La partie à gauche de la caserne principale (au centre du complexe) possède la double tourelle rotative de canons courts de 75 mm. C’est une casemate assez petite qui ne dispose que de 2 pièces.
A sa gauche, une seconde casemate dispose de la 2ème tourelle de mitrailleuses, c’est là encore une structure assez petite.
L’ensemble se termine à l’extrême ouest par une casemate de Bourges équipé d'un canon de 75.

En temps normal, l’ouvrage peut accueillir 140 hommes. Mais durant la bataille de Verdun, jusqu’à 200 soldats occuperont les lieux.

Par le décret du 5 août 1915 qui prévoit le désarmement des forts et ouvrages, son armement a été supprimé.
Ce décret prévoie en effet le désarmement de toutes les fortifications fixes de la ceinture fortifiée de Verdun. Le commandement suprême a pensé qu'elles étaient devenues inutiles, ce qui est somme toute défendable dans la situation de la guerre en août 1915.
Cela, pour plusieurs raisons : Ces fortifications ont un rôle passif par rapport aux armées de campagnes sur lesquelles on mise tout en 1915. Elles sont pilonnées et détruites par l'artillerie lourde ; Elles nécessitent une énorme consommation de munitions qui doivent être acheminée par des voies qu'il faut sécuriser ; Ces obus lourds et la logistique qu'il faut déployer pour les acheminer en sécurité pourrait être employées plus utilement sur d'autres points du front.

Cependant, les 2 canons de 75 mm de la tourelle rotative de l'ouvrage dont le démontage présentait quelques difficultés, ont été laissés en place.

 

Plans de l'ouvrage :

 

Historique de l'ouvrage :

Dès le début de l'offensive allemande, le 21 février, l’ouvrage est régulièrement bombardé avec violence.

Le 14 mars 1916, le général Pétain ordonne le réarmement rapide de la fortification. La casemate de Bourges est équipée de 2 canons de 75.

Très vite, il est évident que le point faible de l’ensemble réside dans l’absence de liaison entre chaque partie. Les hommes sont obligés de sortir au dehors pour se déplacer d’un élément à un autre. En avril 1916, débute la réalisation d’une galerie souterraine reliant la caserne principale à la casemate possédant la tourelle de 75. Cepandant, par suite de la dureté du sol et le petit nombre de travailleur, cette galerie n'aboutie pas.

En à peine un mois de pilonnage, le fossé et le réseau de fil de fer qui le précèdent sont anéantis, parsemés d’immenses cratères. Mais l’ensemble tient bon.

La surpopulation croissante, 140 hommes, entraîne des problèmes sanitaires, de sécurité et d'hygiène. L'eau et la nourriture manquent cruellement.
Le 10 mai 1916, un ordre strict est donné visant à limiter et réguler les accès et l'occupation de l’ouvrage.

En juin, les Allemands se rapprochent sensiblement.
A partir du 20 juin, le pilonnage devient intense. Les 305 et 380 mm allemands tombent avec rage.

Le 21 juin, durant toute la journée, plus de 500 obus dont beaucoup aux gaz viennent s’abattre sur l’ouvrage. Les entrées sont bloquées par la terre, certains obus creusent des trous d’environ 80 cm dans le béton armé.

Le 22 juin, le pilonnage s’atténue mais les gaz sont employés massivement. Les hommes vivent en permanence avec leur masque à gaz. Le soir, le feu d’artillerie reprend avec autant de force que la veille. Durant toute la nuit, de très nombreux obus toxiques continuent à s’abattre sur le secteur.

 

Le 23 juin, à 7 h 35, après une nuit sans accalmie, le bombardement baisse soudain d'intensité. Aussitôt, 50 000 Allemands s'élancent avec lance-flammes et fumigènes. Ils s'étalent de la côte de Froideterre à celle de Vaux-Chapitre, soit un front de 6 km de large. Ils ont face à eux des régiments français à bout de force.

Le 121e B.C.P., en position sur la côte de Froideterre, résiste énergiquement sur sa partie gauche et parvient à repousser l'ennemi. Cependant, son centre et sa droite sont submergés et de nombreux chasseurs sont faits prisonniers. Sur un effectif initial de 1150 hommes, 561 sont morts, 260 sont blessés et 250 sont faits prisonniers.

L'ennemi s'avance ensuite sur les positions que tenait le 121e B.C.P., et se présente sur la ligne Fleury-Abri des Quatre Cheminées. En poursuivant plus au sud-ouest sur 1 km, par la crête Fleury-Thiaumont, l'ennemi atteint à 9 h 30, l'ouvrage de Froideterre.
Déjà, toutes les liaisons de l'ouvrage ont été coupées par le bombardement, les coureurs ne peuvent plus passer, les signaux optiques n'obtiennent aucune réponse (Voir la partie "Fortifications", "L'ouvrage de Froideterre").
L'ennemi encerclent l'ouvrage et gravit la superstructure. La tourelle de mitrailleuse est aussitôt levée mais des débris l'empêchent de tourner. Au même instant, une grenade à main lancée dans une crevasse enflamme le stock de fusées de signalisation. A l'intérieur, l'air devient irrespirable et la panique gagne les hommes. Cependant, équipés de leur masque, ils parviennent à éteindre les flammes et à poursuivre le combat.
Jusqu'à 11 h, la résistance est âpre autour de l'ouvrage. A ce moment, la tourelle panoramique de mitrailleuse parvient à être décoincée, elle arrose tout autour d'elle est contraint les Allemands et se terrer sur place.

Il est à présent urgent et impératif aux forces françaises de réagir et de contre-attaquer. Le 106e B.C.P. qui est positionné vers le flanc nord-ouest de la cote de Froideterre est le premier à passer à l'action. Il contre-attaque face à lui et parvient à réoccuper le retranchement X et la batterie C.

Quatre compagnies du 114e B.C.P., en réserve au bois des Vignes, se portent en toute urgence à l'ouvrage des Quatre Cheminés pour le renforcer. En chemin, de nombreux soldats tombent foudroyés par les obus toxiques. Mais les hommes tiennent bon.
Dès leur arrivée, l'ouvrage et toujours encerclé par les Allemands qui tentent vainement d'y pénétrer. Aussitôt, les chasseurs contre-attaquent à la baïonnette et réussissent à faire reculer l'ennemi et à dégager l'ouvrage.

Les chasseurs du 114e B.C.P. poursuivent ensuite leur progression vers l'ouvrage de Froideterre qu'ils trouvent dans la même situation. Ils chargent aussitôt et refoulent les Allemands vers le village Fleury. Ils sont rejoint ensuite par 2 compagnies du 297e R.I.
Le 114e B.C.P a repris un front de plus de 1500 m (700 m en avant de l'ouvrage de Froideterre).

 

Dans les mois qui suivent, l’ouvrage continue à être bombardé avec violence. Ce n’est qu’avec l'offensive du 24 octobre, puis celle du 15 décembre que l’ouvrage est mis définitivement hors de danger.
Dès lors, l’ouvrage de Froideterre ne sera plus bombardé.

 

Témoignages sur l'ouvrage :

Journée du 23 juin 1916. Témoignage du Capitaine qui commandait l'ouvrage à cette date :

" Les Allemands étaient arrivés sur la superstructure ; la coupole de mitrailleuses, surchargée de terre par les explosions, refusait d'agir. A ce moment, un coup de fortune… Un Allemand jette une grenade dans un trou de 420 qui avait ouvert une cheminée avec l'intérieur du fort, la grenade enflamme un dépôt de fusées éclairantes. Flammes, fumées… Les Allemands épouvantés s'écartent croyant que le fort va sauter. La coupole, libérée par le déplacement d'air, recommence à monter. Bientôt, les Allemands, pris sous le feu, sont tués ou en fuite. A 11 heures, l'ouvrage était dégagé.
Au début de l'après-midi, un bataillon de chasseurs arrive et achève le nettoyage des environs.
"

 

L'ouvrage de nos jours :


La caserne principale


La caserne principale


Tourelle de mitrailleuse de la caserne principale

 


Couloir de la caserne principale

 


Une chambre de la caserne principale

 


Le four (caserne principale)


Le ventilateur (caserne principale)

 


L'urinoir (caserne principale)

 


Tourelle rotative de canons de 75 mm
(à gauche de la caserne principale)

 


Entrée de la casemate


Mécanisme de la tourelle rotative


Mécanisme de la tourelle rotative

 


Seconde tourelle de mitrailleuses
(à gauche de la casemate de 75)

 


Entrée de la casemate

Intérieur de la tourelle


La casemate de Bourges

 


Entrée de la casemate de Bourges

 


Intérieur de la casemate de Bourges

 


Emplacement de l'ancien canon de 75