Les grenades et mortiers à tir courbe :

Le pétard dit " de la III° Armée " :

Les premiers modèles de grenades sont très rudimentaires et ne peuvent, pour ainsi dire, guère porter le nom de " grenades " mais plutôt de " pétard ". Le plus connu d'entre eux est le pétard dit " de la III° Armée ".

D'une grande simplicité, il est construit suivant des spécifications très précises et se rencontre avec 5 types de tubes explosifs différents:
- un tube d'acier lise extérieurement et intérieurement, c'est le plus courant.
- un tube de fonte fragmenté intérieurement.
- un faisceau de tige d'acier de 5 mm de diamètres et de 12.5 centimètres de longueur.
- un tube de fonte à gros quadrillage extérieur.
- un tube de fonte à petit quadrillage extérieur et base plate pour faciliter l'assemblage sur la planchette

Bien que très rudimentaire, il finira par s'imposer sur tout le front, même au cour des années 1916-1917, comme grenade de secours à chaque fois où, pour une raison quelconque, les troupes manqueront de grenades.

 

Pétard de type 1

 

Le pétard de destruction pour barbelés :

Outre les pétards de la III° Armée, il existe pour la destruction des barbelés un pétard explosif à forte capacité.
Il est constitué par un cylindre de tôle roulée et rivetée, fermé à chaque extrémité par un tampon de bois. Le tampon inférieur porte un manche dans lequel est logé le système d'allumage; ce dernier est généralement constitué par un allumeur à traction modèle 1913 ou par une étoupille reliée à une mèche assurant un retard de 5 secondes.
La charge est constituée de 400 gr de cheddite. Pour assurer une explosion uniforme, plusieurs détonateurs sont liés ensemble et reliés par du cordon détonant entre les cartouches de cheddite.
Sur le manche figure, brûlé au feu, un marquage ou figure l'indication du retard "5 secondes" . Cet engin porte quelquefois un crochet de ceinture en fil de fer.
En 1916 apparait un modèle identique mais chargé de 800 gr de cheddite.

 

La grenade modèle 1914 :

La réalisation de ce type d'arme n'étant pas considérée comme prioritaire étant donné l'aspect offensif que devaient prendre en principe les opérations, ce n'est qu'en 1914 que le nouveau modèle sera adopté et les premiers exemplaires ne parviendront aux troupes qu'au cours du premier trimestre de l'année 1915.

Le corps en fonte présente les mêmes dimensions que celui du modèle 1847 mais il est désormais quadrillé intérieurement et l'œil a été fileté. Il eut été préférable de faire le quadrillage à l'extérieur car cela aurait du même coup amélioré la prise en main de cet engin trop volumineux.

 

La charge de poudre reste identique à celle du modèle précèdent: 110 grammes de poudre à canon ordinaire MC 30 (75% de salpêtre. 12.5 % de soufre). La taille des grains variant de 1.4 à 2.5 millimètres.
La grenade s'utilise à l'aide d'un cordeau tire feu. Ce mode de lancement qui demande un espace dégagé assez important derrière le lanceur finira par rendre la grenade inutilisable du fur à mesure que la présence d'engins de tranchée feront leur apparition.
Pour tenter d'utiliser malgré tout les stocks existant on réalisera à la hâte des fusées à percussion et l'on chargera les grenades d'un cheddite explosif plus puissant que la poudre noire. Ces fusées à percussion seront également montées après filetage de l'œil sur des grenades modèle 1847, mais la forme et le volume de ce type de grenade ne permettent pas d'utiliser cette grenade de façon satisfaisante.

 

La grenade Italienne Bezzozi :

A partir du début de 1915, dans l'entente, des nouvelles grenades sont mises à l'étude mais les troupes françaises vont faire un grand usage de la grenade Bezzozi d'abord importée d'Italie puis fabriquée sous licence par la France.

 

Très compacte et quadrillée extérieurement, ce qui lui assure une bonne prise en main, elle est constituée par deux calottes de fonte vissées contenant une charge de 60 grammes d'explosif "P". Le système d'allumage est lui par contre assez rudimentaire: constitué d'une simple mèche munie d'une tête phosphorée.
Une fois chargée, la grenade est plongée dans un bain de paraffine qui lui assure une bonne étanchéité. Son poids total est de 630 grammes et le retard de la mèche est de 7 secondes. Elle est livrée aux troupes chargée est amorcée dans des caisses de 50 pièces.
Malgré un capot de protection, la pâte d'allumage de la mèche est inutilisable par temps humide et c'est souvent avec le fourneau de leur pipe que les poilus ont l'habitude de l'enflammer.

 

La grenade asperge Foug modèle 1915 :

Il s'agit d'une version allégée du modèle précédant, qui utilise un allumeur. Ce dernier est une version du bouchon à percussion modèle 1915 ou le plomb a été remplacé par le bois.

 

Le percuteur est logé dans un sabot de bois qui ferme la grenade. Un léger ressort à boucle maintient le percuteur éloigné de l'amorce.
La mèche qui assure un retard de 5 secondes est fixée au sabot grâce à de la cire à cacheter et le détonateur qui la termine est maintenu sur celle-ci avec une bande de chatterton.
Le sabot est fixé à la grenade par trois petites chevilles de bois et un capot de fer blanc collé à la cire à cacheter protège la tête du percuteur jusqu'au moment de l'utilisation. Ce capot est souvent fabriqué à partir de tôle de récupération et il est courant de constater que l'intérieur porte des impressions ou l'on peut lire des marques de sardines ou de biscuits.

 

La grenade asperge Foug modèle 1915 Long :

En 1915, les ateliers Foug en Meurthe et Moselle construisent également une grosse grenade cylindrique défensive équipée d'un nouveau modèle d'allumeur à percussion protégé par un capot de tôle.
La fabrication de cette grenade sera rapidement arrêtée du fait de son poid trop lourd, aux alentours d'1kg 400, qui ne permet au fantassin de ne porter qu'un nombre trop restreint de grenades. L'allumeur sera cependant conservé et adapté sur les modèles suivants.


La grenade à manche Foug modèle 1915 :

Entre avril et juillet 1915, les ateliers Foug fabriqueront 48 000 grenades à manche copiées sur le modèle allemand. L'allumeur à traction est constitué par une étoupille modèle 1885 dont on a enlevé la charge de poudre pour la remplacer par un bout de cordeau bickford de 5 secondes de retard. Ce modèle porte un crochet de ceinture.

 

La grenade percutante PI modèle 1915 :

 

Il s'agit de la première grenade française percutante. Elle est surnommée "cuillère" en raison de la forme particulière de son levier de sécurité. Lestée et munie d'un ruban jouant le rôle d'empennage, elle éclate à l'impact grâce à une masselotte percuteur.

Cette grenade ne devait pas être très fiable car on peut en retrouver un grand nombre non explosées sur les champs de bataille.

 

La grenade offensive fumante (OF) :

 

Son enveloppe est ovoïde, en fer blanc épais de 3/10 de millimètre. Elle est remplie de 150 grammes de cheddite.
L'allumage est constitué d'un bouchon allumeur automatique. Le montage de l'allumeur sur la grenade est effectué dans les parcs ; l'engin est livré aux troupes amorcé dans des coffrets munis d'un couvercle à charnière, d'un fermoir et d'une poignée de transport.
Poids total de la grenade: 255 grammes.

 

La grenade F1 modèle 1915 :

Vers Mai 1915, la grenade F1 commence à être distribuée à quelques exemplaires.
Construite en fonction des nouvelles conditions de combat, elle est constituée par un corps en fonte monobloc fortement quadrillé extérieurement. Chaque extrémité est percée d'une ouverture résultant des nécessites de fabrication.

 

Les deux ouvertures, inférieure et supérieure, sont filetées pour recevoir le bouchon allumeur. L'ouverture inférieure est scellée par une vis bloquée par un coup de pointeau ou par un bouchon de plomb. Le poids total est de 630 grammes dont 60 grammes de cheddite.
Malgré les 38 divisions du quadrillage, l'explosion produit au plus une dizaine d'éclats qui peuvent être dangereux dans un rayon de 200 mètres.

Elles sont d'abord expédiées non chargées aux armées, par caisses de 100 et fermées par un bouchon de liège ou de papier. Elles seront ensuite expédiées chargées fermées par un bouchon de bois. Après la mise en service de bouchon allumeur automatique modèle 1915, les grenades F1 parviendront aux troupes chargées et amorcées.
La grenade F1 n'apparaîtra couramment sur le front qu'au début de 1916.

 

La grenade citron Foug modèle 1916 :

La grenade citron tire son nom de sa forme caractéristique. En 1916, le profil de la grenade asperge est modifié pour obtenir une meilleure fragmentation. L'expérience a prouvé que ce n'est pas seulement le quadrillage interne ou externe qui détermine le nombre et la régularité des éclats d'une grenade, mais le profil combiné à la charge d'explosif.
Pour les mortiers par exemple, une différence de deux ou trois degrés dans le rayon de courbure du corps permet à l'explosion de gagner plusieurs milliers d'éclats.

 

La grenade citron Foug permet d'obtenir une fragmentation régulière grâce à la faible épaisseur de sa paroi rendue possible par le largeur du col. De plus, le gain de poids par rapport à la grenade F1 permet d'augmenter la charge d'explosif (90 grammes de cheddite pour un poids total de 550 grammes).

Le sabot de bois ne sera pas modifié par rapport aux modèles précédents jusqu'au milieu de l'année 1917, et reste fixé par trois chevilles de bois. Il sera ensuite simplement collé.
Le capot de protection pointu en 1916, devient arrondi, puis plat à partir de 1918. Les capots à tête ronde récupérés par les poilus et emboîtés deux par deux, l'un dans l'autre en sens inverse, leur serviront " d'œuf " à repriser les chaussettes.

 

Pour l'instruction, le fantassin reçoit des grenades totalement inertes peintes en rouge, des grenades vides avec détonateur actif peintes en rouge et marquées de deux "D" blancs et des grenades lestées de sable avec un détonateur actif peintes en blanc. Les grenades chargées comme toutes les autres grenades actives en service ne sont pas peintes ou bien d'une couleur gris bleu.

La grenade citron Foug est livrée aux armées prête à l'emploie, chargée et amorcée par caisses de 20. Cette grenade est à l'origine de très nombreux accidents dûs au transport. En effet, le percuteur dont la masse est relativement importante par rapport à la faiblesse du ressort peut, par exemple lorsqu'une caisse tombe, frapper par inertie l'amorce suffisamment fort pour l'enflammer. On tirera profit de ce défaut en utilisant la grenade citron Foug équipée d'un sabot de bois comme projectile d'un petit engin de tranché, le fusil GUIDETTI de 65 millimètres.

 

La grenade œuf Foug modèle 1917:

En 1917 à l'imitation des grenades oeuf allemandes et anglaises, on fabriquera une grenade citron version miniature.
Le corps quadrillé intérieurement porte à l'extérieur deux anneaux qui assurent une bonne prise en main par temps de grand froid ou de pluie.
Le bouchon allumeur est une version miniaturisée et métallique du bouchon allumeur de sa sœur la grenade citron.

Cette grenade ne se trouve que rarement dans les collections et sur les champs de batailles. Elle n'a donc pas du être fabriquée à de très nombreux exemplaires

 

Les grenades suffocantes:

Il existe avant 1914 plusieurs modèles de grenades suffocantes. Le corps est toujours en laiton étamé intérieurement et la projection du liquide irritant est assurée soit par une légère charge de poudre soit par un détonateur.
Ces grenades sont suffocantes et lacrymogènes. Elles rendent intenable un espace clos ou mal aéré et sont souvent employées pour obliger l'ennemi à évacuer un abri.

 

La grenades incendiaires:

Ces grenades chargées d'essence sont équipées d'un allumeur à friction. La mise à feu du liquide est assuré par un tube central chargé de magnésium en poudre. Dans certains cas, ce tube reçoit en plus un détonateur.
Pour distinguer les grenades avec détonateur, celles-ci portent une marque de peinture rouge sur le col. Les autres portent une marque blanche.
Un petit modèle a un diamètre de 8 cm et un poids total de 500 grammes. Un gros modèle a un diamètre de 12 cm. Sa vis de chargement est placée à la base de la grenade au lieu d'être sur sa partie supérieure.

 

Le mortier de tranchée (le crapouillot):

Ce canon de tranchée a été surnommé " crapouillot " par les poilus parce qu'il ressemble à un crapaud. Il ne possède pas de roues et il est mis en batterie par 2 hommes qui le portent sur un brancard. Avec sa gueule énorme, il est capable de lancer jusqu'à 500 m des obus-torpilles bourrés de cheddite, qui creusent des entonnoirs profonds de 4 m dans les tranchées adverses.
Ce sont les Allemands qui ont compris les premiers qu'avec la guerre de position, l'artillerie aussi devait s'enterrer. Ils mettent au point début 1915 un mortier de tranchée, le " minenwerfer " (lance-mines). Devant une telle arme, les Français ne savent pas quoi faire et ressortent des arsenaux de vieux obusiers de la guerre du Mexique qui ont du mal à tirer et sont très peu fiables.
Ce n'est qu'ensuite qu'ils mettent au point le crapouillot de 58 tirant des projectiles à ailettes.